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22ème anniversaire de l'attentat du Café de Paris.

Mon absence était longue et une fois encore, je présente des excuses sincères à ceux et celles parmi vous (amis, patriotes, philanthropes, simples curieux, voire ennemis) qui avez pris l'habitude de me lire.

Malgré le moment, je suis resté au point mort, le moteur coupé. En effet, l'actualité mondiale et régionale était riche : re-érection de la statue IOG, printemps arabe avec la chute de dictateurs notoires comme Ben Ali, Mubarak, Kadhafi...).  Plusieurs raisons sont la cause de ce long silence. Énumérons les plus importantes avant de passer au sujet du jour.

La disparition progressive des sources d'information (emprisonnements, retournement de veste, mort, etc.) est sans doute une des causes majeures. À ce sujet, il faut mentionner que la mort de mon ami et ''grand frère'' Jean-Paul Noël Abdi m'a plongé dans une sorte de KO technique. Quelques semaines après sa disparition, le vide en matière d'informations fiables en provenance du pays était, et reste encore, permettez-moi l'euphémisme, S-I-D-É-R-A-L. Dans ces circonstances, que peut-on dire quand on n'a presque plus rien de crédible à rapporter?

Mais ce n'est pas tout. En plus du manque d'informations, et je suppose c'est vrai pour bien d'autres, dans mon cas, on peut parler de panne sèche et de manque total d'inspiration après IOG III. La voilà, la deuxième raison. Répéter les mêmes rengaines qui ne changent ni mènent à rien, repasser les mêmes disques qui finissent par être complètement rayés, croyez-le ou non, ça fatigue!

Malgré tout ce qu'on a pu faire ou dire contre son retour, IOG version 3.0 est remonté au trône sans trop de peine. À qui la faute? Comment cela est-il arrivé après le mécontentement populaire de masse du 18 février 2011? En fait, faut-il rappeler une de mes toutes premières réflexions (cf. http://kulanbaded.blogspot.ca/2009/05/qui-est-pret-pour-remplacer-iog.html)? Ben aujourd'hui, rien n'a changé. La situation de l'opposition n'a pas changé d'un iota. Je pourrais rééditer cet article de mai 2009 en ajoutant justes des mises à jour comme la fille Bahdon qui a remplacé son défunt père à la tête du ''parti'' qu'il avait créé, le PSD... Et un tel article serait d'actualité. Que faut-il reprocher alors à IOG et sa clique (proches, courtisans et tutti quanti) quand en face, tous ou presque tous ont les mêmes façons de procéder?

Les responsables du fiasco qui a donné IOG III sont sans aucun doute les leaders de l'opposition. Certes, certains sont sincères mais maladroits voire égocentriques, d'autres sont de grands parleurs mais de petits faiseurs. Certains sont des agents d'infiltration ayant pour mandat de semer la confusion et la discorde au sein de l'opposition, d'autres se sont lancés dans la mêlée sans plan aucun. Certains ont comme plate-forme ou programme politique une seule phrase-leitmotiv: «je veux faire partir IOG, après, on verra». Ça me rappelle Gouled: et son «faisons partir Gaalka, puis on sera entre nous.» Un peu mince pour convaincre!

Sans mettre en doute les motivations profondes de certains opposants (la plupart étant des amis) force est de constater que l'opposition est partie en ordre dispersé et a été incapable de canaliser le mécontentement des masses de février 2011. Cela a facilité la tâche au locataire du bunker de Haramousse et sa bande de malfrats.

En résumé, tout cela génère la lassitude. Cette lassitude est partiellement responsable de mon silence.

Une autre raison à mon silence prolongé et non des moindres est que je suis entré, depuis un certain déjà, dans le club très sélect des quinquagénaires! Cela refroidit bien de fougues, hein? Je me suis donc accordé une période réflexion où ce sont les autres qui parlent et moi qui écoute. Vous conviendrez sans doute avec moi (et comprendrez pour certains) que rester silencieux et écouter n'est pas une sinécure pour un ''macallin''. Mais il fallait bien passer par là. Il fallait que je m'accorde une petite période de ''retour au calme'' et de remise en question sans toutefois fléchir sur l'essentiel ni badiner avec les principes qui ont été les miens, depuis fort longtemps déjà.

Alors, je suis retourné sur les bancs de l'école. J'ai repris des études pour m'occuper et je vais ''graduer'' cet hiver. Voilà donc pour mon absence. Et encore une fois, mille pardons.

Donc grande question, s'il en est: quoi de neuf et pourquoi maintenant?

J'ai passé environ 2 semaines en Somaliland et en Éthiopie. Je cherchais une occasion pour partager mes observations (de visu) avec vous et l'occasion s'est présentée :  ce jeudi soir 27 septembre 2012 qui correspond au 22ème anniversaire de l'odieux attentat dit ''du Café de Paris'' perpétré par des hommes à la solde de Ismaël Omar Guelleh, le jeudi 27 septembre 1990 aux alentours de 20:30. Je vous écris donc à la même date, le même jour: un JEUDI! 22 ans plus tard, au jour le jour.

En plus d'avoir fait de nombreux blessés, cet attentat barbare avait également coûté la vie à deux enfants innocents (un petit français et un petit cireur de chaussures dont personne ne parle, curieusement). Je ne reviendrai pas sur la chronologie de ce drame. Je l'ai couverte l'année dernière:
1. http://kulanbaded.blogspot.ca/2011/09/commemoration-des-evenements-du-27.html,
2. http://kulanbaded.blogspot.ca/2011/10/lattentat-du-cafe-de-paris-chonologie.html,
3. http://kulanbaded.blogspot.ca/2011/10/compte-rendu-de-la-commemoration-du-21.html).
Les autres sources sont également légion (Libération, Paris-Match, Wikipédia, etc.)

Un point mérite d'être souligné cependant. Selon moi, tant que le commanditaire en chef est au sommet de l'état djiboutien et que certains de ses hommes de main sont toujours en service dans le pays, il est de mon devoir citoyen de commémorer ce triste anniversaire.

Ça fait 22 ans que les survivants et les ayant-droits des disparus des camps de concentration et de torture (Brigade d'Ambouli, Brigade du Q3/5, Brigade Nord, Guestir, Ali-Addé...) attendent que justice leur soit rendue. Ça fait 22 ans que ceux et celles qui se sont réfugiés dans les pays limitrophes ou plus loin encore, attentent leur réhabilitation. Ça fait au total 35 ans que razzias,  assassinats, pillage de biens publics, corruption, népotisme et j'en passe sont perpétrés contre mon cher pays par le régime barbare et sanguinaire des Gouled/Guelleh.

Faut-il oublier alors l'attentat du Café de Paris? Oui et non!

Oui pour le pardon. Loin de moi l'idée d'incitation à la vengeance. Oui pour la réconciliation. Mais pour le moment, non, non et non! Il n'en est pas question. Tant et aussi longtemps que les victimes crient justice, que les causes sous-jacentes demeurent et que les bourreaux du peuple squattent les plus hautes fonctions de l'état, il faut continuer de commémorer ce triste anniversaire et dénoncer les coupables.

Non. Il ne faut pas oublier cette date tant et aussi longtemps qu'après les gadabourcis, d'autres djiboutiens innocents comme eux ont été (ou seront) ciblés pour leur appartenance clanique ou ethnique: afars, issas, issacks, midganes, arabes... Tour à tour, toutes les composantes du pays ont été (ou seront) désignées ''Ennemi de la nation''. Non. Il ne faut pas oublier les crimes de ce régime mafieux tant et aussi longtemps que certains quartiers de Djibouti ou des capitales régionales ou encore, tout le nord du pays, resteront des zones de non-droit.

Non. Le 27 septembre 1990 doit entrer dans l'histoire officielle du pays car heureux ou malheureux un événement historique doit appartenir à l'histoire de la nation qui l'a vécu. Le négationnisme a assez duré. À ce propos, je demanderai à ceux et celles qui le veulent bien de marquer un court moment de recueillement ou de lire la Fatiha pour toutes les victimes innocentes de toutes les formes de barbarie humaine.

Cela étant dûment rappelé, parlons maintenant à mon passage en Somaliland. 

De Berbera à Borama je suis passé par toutes les villes, tous les villages et toutes les bourgades installés tout au long de cette route cahoteuse longue d'environ 300km. Même si je ne me suis vraiment arrêté qu'à Berbera, Hargueisa, Gabiley et Borama, je peux dire que j'en ai vu pas mal car mon dernier passage de cette route date de 1986!

J'ai revisité des lieux, rencontré des ''habo'' et des ''eddo'', des ''abti'' et des ''adeer'' et leurs familles devenues nombreuses. J'ai également eu la chance de rencontrer des amis et d'autres proches djiboutiens exilés, retraités et même réfugiés économiques. Oui! Des djiboutiens sont allés s'installer en Somaliland où le coût de la vie est nettement plus abordable.

J'ai fait aussi d'autres rencontres. J'ai pu m'entretenir avec certaines personnes qui ont fui la persécution des ''gadas'' consécutive à l'attentat du Café de Paris! Chez ces djiboutiens, les stigmates du temps et l'exil forcé avaient laissé des empreintes sur des visages jadis rayonnants et des dynamismes de naguère avaient laissé la place à la diminution physique. L'image de certains restera gravée à tout jamais dans ma mémoire. J'ai rencontré enfin la chanteuse Amina Abdillahi Hersi (une de des 1ères chanteuses djiboutiennes devenue chanteuse somalienne depuis sa déportation au tout début des années 70's) et son mari (lui aussi ex-chanteur somalien) Abdirahman Osman Maxabe à qui j'ai remis des distinctions honorifiques au nom d'un groupe de femmes somalies vivant à Ottawa-Gatineau (région de la capitale fédérale du Canada). Un moment lui aussi emprunt d'émotion...

Tout au long de cette route, deux choses frappent: le dynamisme des somalilandais et l'absence d'un état fonctionnel pour assurer les services publics essentiels. Cette observation un peu trop crue, mérite explication. Alors, on y va.

Un fait demeure et mérite d'être souligné. En Somaliland, le citoyen est en règle générale quelqu'un qui a pris, autant que faire se peut,  ses affaires en main, depuis fort longtemps. Ça crève les yeux. Depuis des années, il a appris à survivre (et certains à bien vivre) sans l'aide aucun d'un état. L'initiative individuelle se voit partout. Le visage de gens a changé vraiment. Pas ou très très peu de mendiants dans les rues. Pas de voleur à la tire, ni de pickpockets non plus... Chacun se débrouille. Tout le monde est occupé. Les hôtels de relatif standing, les revendeurs d'automobiles en provenance du Golf,  les petites industries de tout genre ne se comptent plus et les clients sont au rendez-vous!

Hélas, sans parti-pris politique aucun, il y a aussi un revers à cette belle médaille: le pillage des biens communs, le délabrement de la voirie et le retour en masse des ''contrôle'' sur les routes.

Dans les villes comme dans les villages, chaque parcelle de terrain du domaine public (morceau de rue, parcs, cimetières, aires de jeux, stationnements, etc. ont été littéralement pris d'assaut et construits en matériaux d'abord provisoires (bois, tôles, bâches, etc.) puis permanents (pierre et ciment). Le peu de place disponible se partage entre les automobilistes, les piétons, les détritus et les eaux de pluie. Que fait le gouvernement?

Il y a aussi un autre point noir à mettre au crédit des différents gouvernements qui se sont succédés à la tête du pays: à l'entrée et/ou à la sortie de chaque ville, village ou bourgade, il y a un ''contrôle'' où des hommes armés de Kalachnikovs vérifient véhicules et passagers. Cette pratique semble se banaliser et il est là le danger. Un militaire-policier-douanier qui questionne tout ce qui bouge n'augure rien de bon. Ce peuple fantastique mérite un meilleur système de gouvernement!

Passons enfin à l'Éthiopie.

C'est en prenant l'avion à l'Aéroport Pearson de Toronto à bord d'un vol d'Éthiopian Air Lines, le 21 août que j'ai appris la nouvelle de la mort (officielle) de Meles Zenawi, l'homme qui a dirigé ce pays d'une main de fer depuis la chute en 1991 de Menguistu (aka ''le Négus rouge'').

Du 21 août, date de mon départ, au 3 septembre, date de mon retour, dans ce pays, pas un écran de télé qui ne passait pas en boucle la biographie de ce tyran. Pas un journal qui n'affichait pas une (ou des fois, plusieurs) de ses photos et ce, à chaque page (j'ai acheté un échantillon représentatif). Pas un commerce "important" qui ne louait pas un encart pour publier un message de condoléances dans tous les quotidiens. Pas une rue ou un véhicule à Addis-Abeba qui ne portait pas d'affiches à l’effigie du décédé.

Qu'un pays pleure la mort d'un homme d'état... Rien de plus normal. Mais ici, ça dépassait tout entendement. Même la plupart des écrans destinés à informer les passagers à l’aéroport d'Addis étaient étaient mis à contribution pour distiller en boucle ces images!

Le jour de son enterrement, le dimanche 2 septembre, toutes les artères de la capitale étaient fermées aux véhicules automobiles. Seule une poignée de véhicules officiels clairement identifiés et roulant au pas, circulaient dans les rues. Des hommes en uniformes lourdement armés étaient postés à chaque intersection. On aurait cru que l'Éthiopie toute entière était morte!

Voilà un autre cas en Afrique où la culture du culte de la personnalité d'un tyran se pratique sans modération ni retenue aucune et au mépris de toute rationalité. Pathétique.

Pauvres nous!

Hassan Aden
hassan.aden@ncf.ca

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